Kamala Harris à la Maison Blanche : un cadeau empoisonné ?
Le glass cliff - la leçon à retenir ?
Cette semaine, je vous écris depuis New Delhi. Dimanche dernier, alors que j’étais en transit à Paris après un séjour à Istanbul, tout a basculé.
Joe Biden a finalement renoncé à briguer un second mandat. La grande nouvelle, c’est que Kamala Harris, sa vice-présidente un peu dans l’ombre, se retrouve désormais au cœur de l’actualité !
Cet événement marque une étape historique : c'est la première fois qu'une femme noire, d'origine jamaïcaine et indienne, aux multiples identités, se retrouve en lice pour la présidence des États-Unis.
👍🏾 Le plus : en termes de représentation, c'est un moment de fierté et de progrès, illustré par le soutien massif des femmes noires qui ont réussi à collecter plus d'1,5 million de dollars en seulement 3 heures pour soutenir la candidate. Hell yes, mais ce n’est pas gagné !
👎🏾 Le moins : le retrait de Biden intervient à environ 100 jours de l'élection, ce qui laisse à Kamala peu de temps pour préparer sa campagne face à Donald Trump, revanchard, prêt à tous les coups.
Cette annonce pose aussi une question essentielle : pourquoi les femmes et les personnes issues de la diversité sont-elles souvent placées à des postes de pouvoir en période de crise ou lorsque les chances de succès sont minces ?
🟣 Le glass cliff
Dans une récente publication LinkedIn, Christelle Vaugelade-Kalipé, Chief People Officer chez BonoBono et fondatrice de IDEA Pact, une organisation dédiée à l'inclusion dans la tech, fait un parallèle intéressant avec le phénomène du "glass cliff" ou "falaise de verre".
👉🏽 Définition : ce terme désigne la tendance des organisations à nommer des femmes à des postes de direction en période de crise, les exposant ainsi à un risque accru d'échec.
Le concept a été développé par les chercheurs britanniques Michelle Ryan et Alexander Haslam en 2005, qui ont observé que les femmes accédant à des positions de leadership dans ces conditions se retrouvent souvent confrontées à des défis professionnels plus complexes.
💡 Le cas de Kamala Harris me rappelle celui d'Isabelle Kocher, la première femme à diriger une entreprise du CAC 40. En 2016, elle prend les rênes d'Engie alors que l'entreprise traverse une période difficile. Quatre ans plus tard, malgré ses efforts pour redresser la situation, elle a été écartée sous prétexte d'une "intelligence émotionnelle insuffisante". Oups!
Cette situation illustre les obstacles systémiques auxquels les femmes sont confrontées dans le monde du travail ou en politique, et ce, même lorsqu'elles brisent des plafonds de verre. Cf : la vague d’insultes subies par Hillary Clinton lors de la campagne de 2016.
❌ C’est la double peine pour les femmes racisées. En plus des attaques sexistes, Kamala Harris devra probablement faire face au racisme de l’Amérique, surtout avec Donald Trump qui ne rate aucune occasion de briller par sa médiocrité. Mais je reste optimiste. Elle bénéficie de soutiens importants. Des personnalités et des artistes influents comme Janelle Monae et John Legend ont répondu à l’appel. Beyoncé aurait donné son accord pour utiliser sa chanson “Freedom” tout au long de sa campagne… Affaire à suivre !
Le monde d’après…
Je profite aussi de mes longs trajets pour alimenter mes réflexions sur le modèle de société et d’entreprise que nous voulons construire.
🔷 Pour mieux comprendre les enjeux actuels, je recommande cette tribune avec les économistes Anna Creti, Philippe Delacote, et Philippe Quirion, qui revendiquent une “économie de la résilience”.
🔷 Mélanie Tisserand-Berger, présidente du Centre des jeunes dirigeants, défend un “entrepreneuriat responsable” et invite les dirigeants d’entreprise à considérer leur responsabilité sociale et environnementale dans le contexte de la crise politique actuelle.
🔷 Je partage à nouveau mon échange avec Chloé Lécrivain, membre du mouvement “Entreprendre c’est politique”, qui a émergé pendant la campagne des législatives pour porter la voix des solopreneurs, encore trop peu représentée dans l’espace politico-économique !
Lectures d’été
📚 Pour aller plus loin, voici mes recommandations de lectures estivales pour nourrir vos réflexions sur le leadership, l'activisme et la pensée critique :
"Think Again: Pour exceller, transformez votre manière de penser" : Idéal pour ceux qui cherchent à développer leur capacité à remettre en question leurs idées préconçues et à adopter une pensée plus agile et adaptative.
"Holding Change: The Way of Emergent Strategy Facilitation and Mediation": Adrienne Maree Brown explore comment faciliter et médier des stratégies émergentes, offrant des outils précieux pour ceux engagés dans le changement social et organisationnel. (En anglais, non traduit).
"Comment s’organiser ? Manuel pour l'action collective" de Starhawk : Ce manuel est essentiel pour quiconque souhaite apprendre à organiser des actions collectives efficaces en puisant dans les principes de l'éco féminisme et de la spiritualité.
"Joie militante : construire des luttes en prise avec leurs mondes" de Carla Bergman et Nick Montgomery : Les auteurs nous invitent à explorer comment intégrer la joie et la créativité dans les luttes sociales, offrant une perspective rafraîchissante sur l'activisme contemporain.
"Le syndrome du patron de gauche" : Ce livre explore de manière critique les paradoxes et les défis rencontrés par les dirigeants progressistes, offrant des insights précieux sur la gestion de la diversité et du pouvoir.
"Le management de la vertu" de Décryptage des programmes de diversité en entreprise : ce livre explore comment malgré de bonnes intentions, les programmes DEI peuvent parfois privilégier l'apparence plutôt que l'efficacité.
“À propos d’amour" de bell hooks : Un essai profond sur l'amour comme force révolutionnaire, idéal pour ceux qui cherchent à comprendre comment les notions d'amour et de compassion peuvent transformer la société. Idéal après la période de tempête que nous avons vécu ces derniers mois.
Black Existential Freedom de Nathalie Etoke qui propose une réflexion sur la liberté existentielle des corps noirs et de la lutte pour la libération politique. (En anglais, non traduit).
Vu d’ailleurs
🇺🇸 La fin des jobs d'été aux USA. Pendant longtemps, de nombreux Américains ont considéré ces emplois comme un moyen d’enseigner aux jeunes l’éthique du travail, la responsabilité et la gestion financière. Mais le déclin de la population active des adolescents peut en réalité être une bonne chose.
🌟 Ce n’est pas dû à la paresse. Mais plutôt parce que les adolescents passent désormais plus de temps à l’école. Pour comparaison, le taux d’obtention du diplôme d’études secondaires, qui était d’un peu plus de 65 % en 1975, a dépassé les 90 % en 2019, selon Vox.
🧠 Pour vous partager un peu de ma propre expérience : j’ai eu mon premier job d’été au KFC en 2006. L’année suivante, j’ai représenté une marque de spiritueux dans un centre commercial en Guadeloupe. Au fil de l’eau, tous ces petits boulots m'ont appris le sens du service. Pendant mes études à Paris, j’ai aussi été barmaïd et serveuse. Là encore, j’ai adoré le contact avec les clients.
💬 Je serais curieuse d’en savoir plus sur vos jobs d’été ? Quels souvenirs en gardez-vous ? Qu'avez-vous retenu de ces expériences ?
📅 D’ici là, rendez-vous début août avec une interview complète de Jermeen Sherman, Social Impact Entrepreneur, Manager Director du Black Ambition. En attendant, je vous laisse avec un court extrait est disponible sur les réseaux sociaux !
🍵 De mon côté, je continue d’abuser des chaïs, mon obsession du moment. À mon grand dam, j’ai découvert que l’appellation “chaï latte” est une invention occidentale, car "chaï", c’est le terme hindi pour désigner ce mélange de thé, d’épices et de lait. Deliciousssss 😍