79 % des fonds destinés à des entrepreneur·e·s diversifié·e·s vont à des femmes blanches
Where is the money going?
Cette semaine, je vous écris depuis le Canada, car, je participe au Montréal Connect, une semaine dédiée au numérique à l’intelligence artificielle.
Avant le départ, j’ai fait une escale à l’édition parisienne du WVC:E Summit, un rendez-vous européen, organisé en faveur de l’inclusion et l’empowerment des femmes VC qui s’est déroulé à Station F du 2 au 3 octobre.
Pendant deux jours, des investisseuses des quatre coins de la planète se sont donné rendez-vous pour parler du futur du monde des VC et de l’importance d’agir en faveur de l’environnement et des enjeux sociétaux.
Fait assez rare pour le souligner, j’ai identifié des nationalités et des profils venant de tout horizon, tant du côté des participantes que dans les panels. Cela peut sembler fantaisiste pour les non concerné·e·s, mais la diversité des profils a un vrai impact sur la qualité des échanges, la pluralité des avis et des partages d’expérience.
🇪🇺 Ce qu’il faut savoir sur l’écosystème européen
En 2023, 87 % de tous les fonds de VC en Europe seront encore levés par des équipes fondatrices exclusivement masculines. À l’inverse, la proportion de fonds levés par des fondatrices a chuté de 3 % à 1 % depuis 2018. Tel est le constat du rapport 2023 State of European Tech d'Atomico.
Prenons une approche intersectionnelle
Ce même rapport montre que si tous les fondateurs ont eu du mal à lever des capitaux au cours des 12 derniers mois, les fondateurs noirs ressentent davantage de pression. D’ailleurs, plus de la moitié (57%) des fondateurs noirs interrogés par Atomico a déclaré que l'accès au capital a été leur plus grand défi au cours de l'année écoulée, contre 41% des fondateurs blancs.
🇫🇷 Qu’en est-il de la France ?
Au pays des lumières, les femmes entrepreneures ont 4 fois moins de chance de réussir à lever des fonds par rapport à leurs homologues masculins. Cette disparité de financement est d'autant plus préoccupante lorsque l'on considère l'accès quasi-impossible au financement pour les équipes exclusivement féminines. Tel est le (triste!) constat du baromètre annuel SISTA X BCG.
Pour les plus pugnaces qui arrivent à passer dans les mailles du filet, elles ne représentent - malheureusement - que 7% de l'ensemble des levées de fonds, et leurs montants obtenus ne s'élèvent qu'à 2%. Il est essentiel d’avoir en tête que 95% des fonds levés par les femmes ne dépassent pas 15 millions d’euros.
Next 40, un boys club ?
Au moment où je vous écris, Éléonore Crespo, la cofondatrice de Pigment, une plateforme de business management est la seule femme à intégrer le Next40, l’indice des 40 sociétés les plus performantes de la French Tech, contre zéro en 2022.
Comme l’indique cette tribune des Echos, il s’agit d’un progrès timide et insuffisant (insignifiant!) quand on sait que la transformation numérique et la transition écologique se feront indéniablement avec les femmes. C'est l’une des raisons pour lesquelles, je réitère qu’il est indispensable de passer la seconde et de construire des stratégies d’inclusion efficaces et efficientes.
Arrêtons les actions placebos
Pour construire un écosystème à hauteur de nos ambitions, il faut être capable de comprendre les spécificités d’un problème systémique et agir en conséquence. Comme diraient les Québécois : “Pour obtenir des résultats, il faut arrêter les actions plates”.
Assez naïvement, pour féminiser le financement des femmes fondatrices, on pourrait penser que recruter plus de femmes VCs viendrait résoudre le problème. Sauf qu’un article de Sifted, publié en août dernier, intitulé “European VCs see exodus of women investosr” indique que de plus en plus de femmes quittent l'industrie du VC.
Cette tendance inquiétante pour une industrie déjà en difficulté en matière de diversité s'explique par divers facteurs. D’ailleurs, les femmes VC dénoncent un environnement dominé par les hommes, la perception d'un plafond de verre, et des disparités dans la manière dont les performances et leurs rémunérations sont évaluées par rapport à leurs homologues masculins.
Résultat des courses, certaines raccrochent pour lancer leur propre fonds, acquérir une expérience opérationnelle dans des start-up, tandis que d'autres remettent en question leur avenir dans l'industrie.
🗣Who really gives a damn?
Il est évident que l'industrie du VC fait face à un défi majeur en matière de diversité et de rétention des talents féminins. Sauf que le mois dernier, Diversity VC, une organisation à but non lucratif qui promeut la diversité dans le secteur du capital-risque en Europe, aux États-Unis et en Amérique latine a annoncé la réduction de ses activités en raison d'une perte de financement de la part de ses sponsors.
“Lever des fonds a été difficile ces deux dernières années et Diversity VC n'est pas à l'abri de cette situation", a déclaré Ladi Greenstreet, PDG de Diversity VC, à Sifted. L’organisation a déjà licencié un certain nombre de membres à temps plein de son équipe basée au Royaume-Uni et arrêté pas mal de leurs activités.
Des décisions inquiétantes, car ce type d’organisation joue un rôle essentiel pour adresser l’inclusion financière dans sa globalité. Un récent rapport américain de BBG Ventures révèle que 64 % des opérations d'investissement et 79 % des fonds d'amorçage destinés à des "fondateurs diversifiés" allaient à des femmes blanches. C’est pourquoi, il est crucial d’encourager des initiatives intersectionnelles !
En France, j’ai repéré deux programmes anglo-saxons - assez récents - qui peinent encore à faire l’unanimité : le Black Google Funds ou le programme Inclusive Ventures Lab de Morgan Stanley.
Voici ce que je recommande
Dans une tribune avec des punchlines bien senties, Elena Mazhuha, Directeur des investissements chez Flyer One Ventures appelle à plus d’authenticité dans le monde des VC. “J'aimerais que la communauté VC soit plus inclusive, afin que davantage de personnes se sentent à leur place”, clame-t-elle.
Une dose d’inspiration avec la success story de Kelly Massol qui a passé plus d’une décennie à tenir seule le cap de la croissance des Secrets de Loly, une marque pour les cheveux texturés. Pour sa 1ère levée de fonds, elle a choisi Quilvest Capital Partners. “Lorsque j'ai pensé à lever des fonds pour accélérer à l'export, notamment en Belgique, Suisse, Allemagne ou aux Emirats-Arabes-Unis, j'ai été étonnée du nombre d'investisseurs intéressés. J'ai reçu 9 lettres d'offres de fonds”, confie la fondatrice.
Par manque d’opportunité de lever de fonds, de plus en plus de fondateur·trice·s noir·e·s décident de faire des exits pour avoir les fonds nécessaires pour faire grandir leur activité. Cet article de Forbes porte une réflexion intéressante sur la gentrification des “black founders”.
🔥 À ne pas manquer
Lancement de Test&Work Talk ! Rendez-vous le 11 et 12 octobre, pour les premiers #Test&WorkTalk, qui auront lieu dans le cadre de la Semaine de l'Entreprise Responsable et Inclusive (#SERI23), organisée par l'AFMD et le Medef du 9 au 13 octobre.
💜 DE&I : Microsoft brise le tabou sur la diversité social et ethnique.
Guest speaker : Didi Diarra, Senior Executive Recruiter, chez Microsoft et D&I Advocate, membre de l'ERG Origines. Elle nous racontera les coulisses de cette initiative. En attendant, vous pouvez lire cet article qui revient sur la démarche du groupe, juste là.
Le 11 octobre de 12h30 à 13h30 sur Linkedin. Pour participer, c’est ici.
💜 Santé des femmes : les entreprises face à l’endométriose
Mes deux invitées : Carine Kraus, Directrice exécutive de l'Engagement, membre du COMEX du Groupe Carrefour, et Élodie Placide, fondatrice & CEO - Clitty, une marque de produits sains pour simplifier les règles.
Le 12 octobre à 12h30 à 13h30 sur LinkedIn. Pour participer, c’est ici.
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